Etonnement de l'arrivée et du retour.

Ouais, on avait toujours été à l’aise au BEM. Tout le monde se disait tu sauf quand on voyait le grand patron. Après tout, on ne travaillait pas pour la Reine d’Angleterre. Alors pourquoi s’embêter avec des vous ? Sans compter que l’homme qui s’adressait à moi n’était pas vieux alors pourquoi je lui dirai vous ? Il allait y avoir de fortes chances pour que je le croise souvent en plus du reste. Je lui faisais un petit sourire en coin même si je n’en avais pas vraiment envie. Mais il fallait vraiment que j’essaie de penser à autre chose.

« Oh mais si tu préfères que je te dise vous c’est comme tu veux. Enchantée Steeve. Oui, ça va faire quelques années que je suis ici." 

Bon, il fallait quand même que je fasse attention à ce que je disais car après tout, je ne le connaissais pas. On avait été entraîné pour se méfier des gens et faire attention à ce que l’on disait. Sans compté qu’il était nouveau et j’avais toujours eu cette tendance à être un peu parano. C’était peu-être pour cette raison que je ne faisais confiance à personne et que j’étais toute seule. Comme on dit, il vaut mieux être seule que mal accompagnée. Je ne pouvais pas m’empêcher de penser à mon père et au fait que ce dernier allait très probablement m’arracher la tête quand il allait savoir ce que j’avais fait. Mais je savais que Tamara savait ce qu’elle faisait de toute façon. Il était hors de question que je la laisse faire ça toute seule.

Je savais par habitude et parce que je suis doué pour me foutre dans la merde, que si je voulais m’en sortir, jouer la comédie était la meilleure des alternatives. Mais plus encore, je devais faire preuve de discrétion pour ne pas me faire remarquer et ainsi préserver un peu plus longtemps mes charmantes petites fesses. Et quoi de mieux, en de telles circonstances que de sympathiser avec les personnes que j’étais amené à croiser ? Et si en plus, elles ne sont pas désagréables à regarder, cela fera de moi l’espion en carton le plus comblé. Ainsi, elle s’appelait Maisie ; un prénom original que j’étais à peu près sûr de n’avoir jamais entendu jusqu’à aujourd’hui. Elle semblait jeune, plus que moi. Et le sourire qu’elle laissait paraître, une légère esquisse sur son visage d’ange, n’était que simulacre. Il me suffisait de plonger mon regard dans le sien pour passer outre la fuite et me rendre compte que son esprit semblait enclin à quelques vagabondages en bon et due forme ; ou peut-être n’étais-je pas assez intéressant pour qu’elle se risque à un échange plus constructif.

« Tu penses trop Darren, genre trop ! »

« — Ah non ne me vouvoie surtout pas. J’aurai l’impression d’être un vieux croulant. Non le “tu” c’est parfait. » Et pour continuer à jouer la politesse et par curiosité, je tentais de m’enquérir de ses états de service et du nombre d’années passées ici. « — Tu as dû commencer jeune. » Je me maudissais déjà d’avoir laissé entendre ça, mais que pouvais-je y faire ? Chez moi, la curiosité bien au-delà d’être un vilain défaut était comme une sorte de seconde nature contre laquelle je luttais difficilement. « — Ils n’avaient pas l’air très commodes les gens de l’ascenseur. Surtout la brune et le type légèrement grisonnant. C’est le big boss non ? » Je me sentais con de soudain paraître si « con. »

J’avais été suffisamment entraînée pour reconnaître un fouineur quand j’en avais un juste en face de moi. Il commençait à me poser des questions et il était hors de question que je lui réponde avec franchise. Je ne le connaissais pas et je n’étais pas le genre de personne qui accordait sa confiance aussi facilement. Je décidais donc de le faire de manière tout à fait évasive. Déjà, le vouvoiement je n’aimais pas ça du tout mais au moins, il était poli et c’était une chose que je ne pouvais pas lui reprocher. Les gens comme ça étaient rare de nos jours.

« Bien alors on va se dire tu, je pense que c’est mieux. Je ne suis peut-être pas aussi jeune que ce que tu penses. » Et je lui faisais un clin d’oeil. I je commençais à répondre à sa question, j’allais devoir commencer à lui parler de ma vie privée et ça, c’était juste absolument hors de question. « Oui, il s’agit du grand directeur et tu as raison, il n’est pas super commode.. Quand à la brune, il s’agit du meilleur agent de terrain que je n’ai jamais connu de toute ma vie. J’en ai vraiment apprit beaucoup grâce à elle. »

Ca en revanche, ce n’était pas du tout un mensonge. Même si au début, la relation entre Tamara et moi était assez tendue, nous nous étions finalement rendue compte que nous avions le même but, celui de protéger mon père et les autres. Mais je devais faire profil bas et exécuter les missions que l’on me donnait, même si je n’étais pas toujours d’accord avec leur façon de procéder. Mais je faisais profil bas et je faisais ce que l’on me demandait. Bon, après, si la personne arrivai à s’enfuir et bien c’était un hasard non ?

Je commençais à faire les cents pas dans la pièce. Je n’avais aucune manière de savoir comment ça se passait pour Tamara et je devais bien avouer que la situation me rendait pas mal nerveuse. Je connaissais bien assez le directeur pour savoir de quoi ce dernier était capable.

Ce sale fouille-merde de Sheppard me préparait un mauvais coup, je le sentais, je le voyais à s tronche, un peu trop content pour que ce soit net. J’avais plutôt un bon instinct en plus. Mais je restai impassible, comme si je ne me doutais de rien, et je le suivis jusqu’aux sous-sols. Rien n’avait trop changé. Je reconnus quelques visages et me contentai de faire des signes de tête. Voilà qu’il me demandait si j’étais en forme.

- Bien sûr ! répondis-je faussement enjouée. 

Il ouvrit la porte et ce que je redoutais s’y trouvait : une demi-déesse. Une gamine qui plus est ! Je l’observai avec un air de mépris et de dégoût, mais qui était en fait destiné à Sheppard, cependant, mes talents d’actrice étaient bien utiles en ce moment. Par tous les putains de dieux de le putain d’Olympe, j’allais probablement devoir tuer cette gamine. Je me saisis immédiatement du flingue, mon arme de prédilection, et vérifiai le chargeur avant d’ôter la sécurité.  

- Avec joie, mais avant, j’aimerais savoir quel genre de pouvoir elle a…. Je suis pas suicidaire, et sur le terrain, nos agents de liaison nous brieffent.

Je gardai la demi-déesse en joug par réflexe et parce qu’on ne savait jamais, et de toute façon, c’était ce que Sheppard attendait de moi.

- On sait jamais avec ces vermines...

Et puis c’était vrai, si son pouvoir était de déclencher des décharges électriques, merci bien… Et c’était tout à fit le genre de Sheppard de faire ce genre de blague à la con. Avec un peu de chance, il s’amuserait assez de me voir la tabasser et il jugerait qu’elle est assez importante pour ne pas la descendre... Je détestais avoir à buter des gamins, je l’avais fait une fois en 2015 lors de la mise à sac du camp Olympum découvert par le B.E.M. Je n’avais alors aucune idée du fait que l’effectif ennemi était composé à 90 % de jeunes... J’avais mis si longtemps à me défaire de ce traumatisme, et voilà que j’allais le revivre… Sauf que cette fois, j’étais une mère… et il me faudrait trouver la force de descendre une enfant en espérant sauver la mienne.

- Je peux vous la faire parler sans souci, c’est ma spécialité, mais j’ai besoin d’un minimum d’info.

Comme ça a toujours été le cas, gros trou d’uc, t’as pas déjà oublié...

Sheppard était un connard de la pire espèce, il n'y avait pas d'autre descriptif à faire. Il faisait tout pour me mettre hors de moi, et le pire, c'était que cela fonctionnait. Je n'allais pas avoir le choix que de tuer cette gamine et cela me révulsait. J'imaginais la douleur de ses parents, s'ils étaient encore en vie, et ne la comprenait que trop bien, maintenant que j'étais une mère moi-même.

J'ai bien compris, monsieur, mais sauf votre respect, n'ayant pas eu l'information quant au pouvoir exact de la chose, je me suis permis la question. Prudence est mère de sureté à c'qui paraît...

Je le voyais avancer et continuer à déblatérer ses conneries... Nom de Jupiter, pourquoi je ne pouvais pas directement le flinguer ce gros enculé ?

- De plusm si je la bute, ça ne va pas déclencher son pouvoir, elle va juste crever... A moins que ce ne soit juste ça que vous vouliez... Moi qui pensais que vous vouliez son pouvoir pour le pôle recherche... déclarai-je en retirant la sécurité de l'arme à feu qu'il m'avait mise en main.

Je le vis alors passer derrière l'adolescente pour commencer à poser ses mains autour de son cou et serrer. Je vis le regard plein de larmes de la jeunette, me suppliant des yeux. Que pouvais-je faire sinon abréger ses souffrances ?

- Me prenez pas pour une conne, Sheppard. Je vais vous la déglinguer, c'est pas le souci, je voulais juste éviter de me prendre un retour de flamme ou une décharge dans la gueule... C'est pas comme si c'était jamais arrivé, pas vrai ?

Je braquai alors tout droit la tête de la demoiselle. Sheppard n'avait pas l'air enclin à me dire quoi que ce soit d'autre. Du coup, il fallait que je presse la détente puisqu'il était assez con pour ne donner que la moitié des info, voire même pas du tout. Aucune idée de ce que pouvait être le pouvoir de cette petite, mais une chose était sure, elle allait mourir aujourd'hui. Mieux valait que ce soit rapide et propre plutôt que de la laisser agoniser de longues minutes entre les mains du pire connard que la Terre ait porté. La regardant dans les yeux, je fis ce qui me hanterait encore le restant de mes jours.
J'avais pressé la détente. Le bruit sourd résonnait encore dans la pièce. Le crâne de la jeune fille était pourvu d'un trou pil entre les deux yeux. Intérieurement, j'avais prié que la balle puisse la transpercer pour butter Sheppard aussi... Vainement. J'avais réussi à garder mes traits impassibles comme si cette mise à mort ne m'avait rien fait, mais intérieurement je hurlai.

J’avais conscience du danger autant que je me doutais que le simple fait de poser trop de questions pouvait ; en plus d’agacer, faire peser de lourds soupçons sur moi. Que voulez-vous, on ne se refait pas, j’irais même jusqu’à plaider la déformation professionnelle à défaut d’une trop grande curiosité. Mais je ne pouvais m’empêcher, je voulais savoir ce qui se tramait exactement ici, conscient que j’avais peut-être de quoi pondre un putain d’article et peut-être d’élucider les quelques disparitions dénombrées dans la ville de New-York. Car à n’en pas douter, cet endroit à la devanture lisse n’était pas là pour vous reforger quelques merdes médicales ou technologiques. J’étais à peu près sûr qu’ici l’on faisait des choses pas très nettes et que pour se faire, il fallait des cobayes.

Maisie me faisait l’effet d’une bonne personne, bien que ce jugement en l’absence de plus de preuves, me paraisse un tantinet surfait. Mais je n’avais que ça pour l’instant et faute de mieux je devais m’en satisfaire et continuer à discuter avec la jeune femme, pour peut-être glaner d’autres informations.

— Tu, me sembles la meilleure des alternatives, surtout si nous sommes amenés à nous recroiser ce dont je doutais, tout comme je doutais d’être à même de rentrer dans un quelconque jeu de séduction. Pourtant ce n’était pas l’envie qui manquait, car il fallait bien reconnaître à la demoiselle un charme indéniable. Mais comme bien des choses, il avait ses limites et de toute évidence, Maisie Cooper n’était pas prête à trop se répandre en détail. Tant pis ! Elle accepta cependant de rebondir sur un autre sujet, tout aussi intéressant pour l’apprenti espion que je suis.

— Pas commode, mais avec un peu de charisme, juste ce qu’il faut pour diriger. Je compris très vite que la brune aux côtés du directeur peu flexible avait acquis le respect de Maisie, mais autre chose titilla ma curiosité, le terme « agent de terrain. » Pourquoi donc était-il question d’agent de terrain ? Où avais-je donc mis les pieds ? Si mon côté journaliste semblait accueillir la nouvelle avec excitation, une autre partie de moi redoutait d’être confrontée à quelque chose qui me dépassait. Je devais trancher dès lors. Où je me mettais à poser trop de questions ; au risque de me griller ; où je trouvais un subterfuge pour mettre les voiles. Je fis donc mine de regarder le cadran de ma montre, faussement offusqué par l’heure.

— Ah merde, je suis à la bourre. Désolé, je ne suis décidément pas doué avec la ponctualité. M’en voilà rendu à récupérer mon plateau. — Ce fut un plaisir que celui de te rencontrer. À tantôt sûrement.  J’étais à peu près sûr de ne jamais recroiser cette demoiselle, mais je devais paraître crédible. C’est sur ces mots que je quittais le réfectoire, pour ensuite recouvrer ma liberté à l’extérieur de ces bâtiments alourdis de mystères que j’étais bien décidé à percer à un moment donné. Reste à savoir quand et comment ?

Par tous les foutus dieux de la putain d'Olympe, que j'avais envie de buter Sheppard. Même pas cinq minutes en sa pr.sence réveillait en moi la plus noire des colères, mais jke me maîtrisais, j'avais fait un travail sur moi pendant quatre ans, je m'étais préparée à tous les scenarii possibles et imaginables, et même à un reconditionnement. J'étais prête à tout endurer pour qu'il me reprenne à mon poste d'agent de terrain et pouvoir, à terme, le et les faire tomber de l'intérieur.
Il m'avait forcé à tuer cette gamine. De toute façon, je n'avais pas le choix, et elle était condamnée. Je n'avais jamais eu vent d'aucune évasion du B.E.M du temps où j'y étais, et j'y était restée plus de quinze ans. J'étais loin de me douter que d'ici quarante-huit heure, cette vérité n'en serait plus une.
La remarque de Sheppard me laissa stoïque.

- Vu la tête que vous tirez, vous avez pourtant l'air de vous amuser comme un petit fou.

C'était vrai, il avait l'air de prendre un plaisir certain à voir mourir des créatures. J'avais envie de hurler et de tabasser ce connard à mort. Et voilà qu'il lâcha le nom de Calwell. Elle était passée sous-directrice section terrain, je l'avais appris par Marvin qui lui était le sous-directeur section liaison.

- Elisabeth Caldwell est passée boss ? Waow sacrée promotion.

Je faisais mine d'être impressionnée mais en réalité, je n'en avais rien à carrer.
Voilà que Sheppard demandait une autopsie. Pourquoi ? On savait de quoi elle était morte après tout. Que j'avais en horreur ce type ! Je le suivis donc, ruminant intérieurement ma colère. Je me revoyais la première fois que j'avais fait tout ce chemin, j'avais été si enthousiaste. Aujourd'hui, je feignais cet état, me rappelant ce que j'avais ressenti à l'époque. Aujourd'hui, mon enthousiasme concernait le jour où je les ferais tous péter.

- Un contrat, ça semble plutôt normal. J'en avais aussi signé un la première fois.

Maisie était devant la porte du bureau de Sheppard. Je faisais mine de ne pas être si proche d'elle que cela. Nous avions parlé boulot et entraînement voilà cinq ansm quand j'étais encore agent, ça s'arrêtait là. Je suivis Sheppard dans son bureau et esquissai un sourire.

- Comme si j'avais besoin de ce genre de menace pour signer. Vous savez très bien que j'ai toujours adoré ce job. Sans compter que ça me ferait un peu chier de me retrouver au même grade que ces saloperies que je vous ai ramenées durant seize ans.

Je m'empressai alors de lui prendre un stylo dans le pot à crayons posé sur son bureau et de lire l'intitulé du contrat. OK, j'étais dans la merde si j'étais grillée... Enfin, ça avait toujours été le cas mais cette fois c'était stipulé noir sur blanc. Ils avaient sûrement dû prendre des précaution depuis le précédent. J'avais finalement tout lu, paraphé en bas de page et signé, étant penchée sur son bureau. Puis je retournai le tas de feuille pour qu'il l'ait devant lui, et me redressai.

- Voilà boss. Ravie de refaire partie de l'équipe. Je saurai rattraper ces quatre putain d'années d'absence, vous verrez.