Mon histoire commence le
19 juillet 1997 à Santander en Espagne, et comme me l'a toujours raconté mon père, je serais née alors qu'un arc en ciel était visible dans le ciel. Enfant unique mais entourée d'une famille nombreuse d'oncles, tantes, cousins, cousines, grands parents bien que dans l'absence d'une mère. Cette absence n'était pas bien perçue par les autres adultes de la famille ne pouvant s'empêcher régulièrement de la traiter d'irresponsable ou de femme de faible morale mais jamais mon père ne laissa son nom être souillée par qui que ce soit, ce qui amenait à des disputes fréquentes entre lui et le reste de la famille. Je garde un souvenir de ces années très positif malgré ces disputes, me souvenant surtout de cette île portuaire et des longues balades dans lesquelles m'emmenait mon père le long de la mer. Petite j'étais fascinée par la mer et dès que je pus marcher je voulais aller m'y baigner à la moindre opportunité qui se présentait. Et quand je commençai à parler, dans mes premières phrases apparut celle qui me suivrait toute mon enfance: elle est où maman? Ce à quoi j'obtenais des réponses vagues comme "elle ne pouvait pas rester mais elle t'aime de tout son coeur", "elle est très occupée à faire sa part, à nous de faire la nôtre", "elle aide des gens importants". Aucune ne me satisfaisait, mais au fil des années je m'en contentai comme je pus et c'était uniquement grâce à mon père. Il était tout pour moi, mon roc, mon protecteur, mon confident et mon supporter.
Tout se passait bien au final, jusqu'à mes
8 ans. Comment pouvais je savoir qu'un simple geste aussi innocent pouvait déclencher autant de colère? Un simple bisou dans la cour de récré déclencha l'indignation de ma famille et je ne compris pas tout de suite que le problème n'était pas le geste mais bien que c'était un bisou avec une petite fille. J'entendis des mots que je ne comprenais pas, comme quoi je serais "malade", que c'était un "péché", que je devais me faire "soigner". Heureusement, il y avait mon père pour me défendre au milieu de mon incompréhension de la situation, mais ce n'était plus une dispute comme il avait pu y en avoir, la situation devint rapidement un conflit dont chaque camp postait ses positions. Jusqu'à ce que mon grand père en vienne aux mains avec mon père et cette scène était trop pour moi, je me mis à hurler de toutes mes forces avant d'essayer de m'interposer, ne supportant pas de voir quelqu'un faire du mal à mon père. Je pris un coup perdu du haut de mes 1m20, ce qui mit fin à toute discussion possible entre mon père et le reste de la famille. Quelques jours plus tard, il décida de m'emmener loin de ce qu'il refusa d'appeler une famille pour le reste de ses jours.
Pendant le vol, mon père m'expliqua où on allait,
New York, une des plus grandes villes au monde qui était traversé par une grande rivière et avec un des plus grand parc. J'essayais de sourire mais il voyait bien que je me sentais mal, et je n'arrivais pas à lui mentir, à personne mais encore moins à lui. Je me sentais coupable car pour moi c'était ma faute si on avait du partir et laisser derrière nous notre famille. Ce fut la première fois qu'il haussa le ton avec moi, m'interdisant avec véhémence de penser cela et me disant que je n'avais rien fait de mal et que la situation était inévitable. A notre arrivée, les premières semaines furent très difficiles, ne parlant pas un seul mot d'anglais. Tout ce que je connaissais c'était l'espagnol et le français, les langues dans lesquelles je communiquais avec mon père qui était professeur de français. Mais à l'étonnement de tous mes camarades de classe et de mon professeur, j'arrivai à me débrouiller en à peine un mois en partie grâce à l'aide de mon père qui passait un bon nombre de soirées à me donner des cours particuliers.
La vie suivit son cours relativement normalement, vivant dans une plus grande ville les "visions bizarres" que j'avais se multipliaient mais j'avais bien compris que ce n'était que mon imagination. Après tout, personne ne pouvait ressembler à moitié à une chèvre, ce n'était pas possible. Enfin, ça c'était
avant mes 12 ans, avant que je commence à parler dans la tête des autres et même si ce n'était que pour les aider ou par maladresse, il fallut que je change d'école. Malgré les mots rassurants et bienveillants de mon père, je vivais ça comme un fardeau trop lourd et injuste dont j'aurais aimé me débarrasser. A cause de ça, je commençais à me disputer avec lui au sujet de cette mère absente dont il parlait toujours en bien et dont l'absence me pesait de plus en plus. Je me disais que tout aurait été différent si elle ne m'avait pas abandonné, ne nous avait pas abandonné mon père et moi. Nos disputes étaient compliquées, forcément j'essayais de mesurer mes propos mais ce que je pensais vraiment s'exportait dans l'esprit de mon père malgré moi, la boule émotive que j'étais n'aidait pas à contrôler ce "don" pour employer le terme que mon père utilisait. A mes yeux, il s'agissait d'une malédiction à cause de laquelle je ne pourrais jamais vraiment avoir d'amis ou personnes autre que lui sur qui compter ou partager une quelconque proximité.
Et c'est quand je croyais avoir touché le fond que la vie me prouva que ce n'était pas le cas. L'été de
mes 13 ans, je me retrouvai à flotter dans l'air au milieu de Central Park pour avoir voulu rattraper le ballon d'un enfant. J'avais dû, à cause de la chute brutale pour revenir au sol, aller à l'hôpital et bien qu'un premier médecin m'avait dit que ce n'était rien de grave, juste une épaule abimée et deux côtes fêlées, un peu plus tard une autre médecin m'annonçait que je devais être transférer dans un autre hôpital. J'aurais pu y croire si ce n'était que dans l'ambulance on m'attacha, me bâillonna et me mis un bandeau sur les yeux. Sur le chemin, l'ambulance s'arrêta et j'entendis des cris, des bruits et le véhicule qui bougeait dans tous les sens jusqu'à ce qu'une personne m'embarque en me murmurant que tout allait bien se passer et que tout serait bientôt fini. Les seuls mots que je pus prononcer étaient pour savoir où était mon papa tout en m'agrippant à cette personne de toutes mes forces. Sous le choc, ou peut être simplement en rechute de l'adrénaline que mon corps s'était auto-injecté, je n'avais pas clairement conscience de la direction qu'on prenait étant perdue dans l'incompréhension la plus totale. Je me réveillai, réalisant même que je m'étais endormie, à l'arrière d'une voiture alors que quelqu'un me touchait l'épaule et une fois que ma vue s'éclaircit, je distinguai le visage de mon père. Maladroitement et pas totalement réveillée je me jetai hors de la voiture et dans ses bras en pleurant de joie de le sentir contre moi. Mon empressement ne s'était pas fort embarrassé de finir au sol et je ne le lâchai qu'après plusieurs minutes et plusieurs interpellations d'une voix féminine qui me parut familière. Je relâchai mon étreinte et soudainement le visage de mon père devint très sérieux avant de me dire d'un ton solennel
"Il faut qu'on parle Emi, et Gloria a raison, on a pas beaucoup de temps."
Je me tournai vers cette fameuse Gloria et en quelques seconde les morceaux d'un puzzle inconscient s'assemblèrent, je la reconnaissais, la gentille voisine, maman d'un camarade de classe qui avait changé d'école en même temps que moi, qui promenait toujours son chien quand je décidais de faire un jogging et surtout qui était là au parc. Mon cerveau était noyé de toutes ces questions qui se bousculaient dans ma tête, je voulais parler mais rien ne sortit. Ce fut elle et mon père qui me bombardèrent d'informations et de révélations à la fois expliquant tout ce qui m'arrivait et m'était arrivé et pourtant, à mes yeux, complètement dingue. A la fin Gloria s'excusa m'expliquant que c'était son rôle de veiller sur moi et à quel point elle s'en voulait que la situation ait autant dégénéré. J'étais trop assommée de cette histoire de fille de déesse et de ce groupe qui voulait ma mort et celle de tous les gens comme moi pour arriver à être en colère contre elle. Mais ce n'était pas le plus important ou le plus pressant, étonnamment, il fallait apparemment que je me rende à un campement non loin de là où je serais en sécurité et où on m'apprendrait à utiliser et contrôler ces "pouvoirs". Cela impliquait être séparée de mon père et cette idée me terrifiait et il le comprenait bien essayant de trouver tous les arguments pour me convaincre d'aller là-bas, que c'était le plus sûr, que c'était ma chance de rencontrer d'autres personnes comme moi, que personne ne me jugerait et que c'était ce qu'aurait voulu ma mère. Ce dernier argument me fit exploser de rage, consumée par la colère de n'avoir rien demander, par l'injustice que me faisait ressentir toute cette situation et que tout ça était sa faute.
Je l'emmerde Arcus! Qu'elle aille se faire foutre! Je levai les yeux au ciel
Tu m'entends, je te détesteJe m'encourus entre les arbres de l'orée de cette forêt où nous étions et sans même réfléchir m'élevai du sol pour atterrir sur la branche d'un de ces arbres, recroquevillée et pleurant toute cette colère à l'égard de cette génitrice divine. Entre deux crises de larmes je commençai à distinguer de petits et délicats chants d'oiseaux avant de sentir quelque chose sur mon épaule. Je tournai la tête et vit ce petit
oiseau au pelage jaune qui semblait presque luir dans l'ombre procurée par le feuillage de cet arbre. Il se rapprocha lentement de mon visage venant tendrement se frotter sur ma joue avant de soudain prendre son envol sous mes yeux ébahis qui, après l'avoir perdu de vue, se posèrent sur mes genoux. Sur l'un deux reposait une de ses plumes. Devenais je folle? Ou était il vraiment possible que ce soit elle, Arcus, ma mère, qui m'envoyait un signe. Je descendis de l'arbre pour tomber face à cet homme qui m'avait secouru et eut un sourire, rassurée de sa présence, avant de me mettre en marche pour retourner auprès de mon père et Gloria. En arrivant devant eux, je fixai mon père en ouvrant ma main tenant cette plume. Il ouvrit des yeux débordant d'une sincère surprise avant d'afficher un grand sourire et hocher de la tête en réponse à mon regard interrogateur. Je lui tendis la plume
Prends là, et tu me la rendras le jour où je rentrerai de ce campement.J'avais besoin d'une manière ou d'une autre d'avoir une forme matérielle de promesse que je rentrerai à ses côtés un jour ou l'autre. Tout cela était trop frais pour réaliser que ce jour serait le début d'une autre vie, une vie qui ne se vouerait plus à prétendre être normale mais bien à prendre le rôle qui m'avait été donné de par ma naissance. Mon sauveur nous rappela poliment qu'il était temps d'y aller si on ne voulait pas prendre des risques inutiles. Un câlin à mon père qui m'embrassa sur le front, et un mot de pardon et de remerciement à Gloria et nous voilà partis. Le chemin ne fut pas si long, et pendant celui-ci j'échangeai un peu avec ce demi dieu venu à ma rescousse apprenant son nom, Haytham. Arrivée au campement, je le remerciai de tout, lui devant la vie et bien plus encore, avant de faire nos adieux tout en espérant, au moins pour moi, de pouvoir se revoir un jour.
Les années au
campement n'étaient pas évident, surtout au début ayant plus appris cacher mes pouvoirs et les voir comme une malédiction. Il me fallut beaucoup de temps pour dépasser la peur qu'ils m'inspiraient et malgré cela, j'étais entourée de gens comme moi qui, malgré les disputes éventuelles, me comprenaient et m'acceptaient. Avec le temps, je me mis même de temps en temps à utiliser ma télépathie pour faire de petites blagues à mes camarades de promotion. Je pris même plaisir à apprendre tout ce qu'on nous enseignait, à repousser les limites de mes pouvoirs et à découvrir les possibilités qu'ils m'offraient. Toutefois, je découvris autre chose là-bas que j'avais refoulé à cause de mon enfance: l'amour. Une fille avec qui l'attraction fut presque immédiate, étant de la même promotion, chacun de nos moments étaient des moments volés mais cela ne nous arrêta pas. Si ces années devinrent mémorables à mes yeux, c'est en grande partie grâce à elle qui avait su prendre plus de place dans mon cœur que je n'aurais cru pouvoir en donner à quiconque. Toute cette vie m'avait fait oublier les dangers que ce monde nous réservait à nous, enfants de parents divins.
Cette fatidique nuit du
1er février 2015, je m'étais réveillée au milieu de la nuit ayant entendu un bruit d'oiseau qui venait d'une des fenêtres du dortoir où je dormais. C'est en ouvrant celle-ci que j'aperçus, non pas des combats, mais un massacre, des étudiants et étudiantes tombant les uns après les autres. Je hurlai en quittant le dortoir pour réveiller mon dortoir n'ayant en tête qu'une pensée, rejoindre l'élue de mon cœur. Et à peine sortie dans le couloir, un professeur tentait de protéger des élèves d'une femme dont le visage s'encra à tout jamais dans mon visage. J'entendis la professeure prononcer son nom, Tamara. J'étais tétanisée jusqu'à ce que, blessée, la professeur me hurla de fuir avec tous ceux qui le pouvaient. Il me fallut un quart de seconde pour trouver le courage de sortir de ma tétanie. Je ne pouvais emmener qu'une personne à la fois et donc agrippa la première personne que je vis avant de m'enfuir grâce à mon pouvoir de mouvement aérien. Je fis mon possible pour faire des premiers soins improvisés sur cette personne avant de retourner au campement par les airs, m'y pensant à l'abri, une erreur. Cette femme du couloir me tira dessus et je crus esquiver, ne faisant au final qu'éviter la mort instantanée. A mon réveil, une femme m'interdit de bouger, je prononçai interrogativement le nom de ma dulcinée, elle ne me répondit pas. Je regardais autour de moi jusqu'à croiser le regard d'un camarade la connaissant lui murmurant mentalement son nom, ses pleurs furent ma réponse. Je l'avais perdu à tout jamais, perdant en même temps une partie de moi-même cette nuit là.
6 mois plus tard, j'atteins mes 18 ans, jour où je devais recevoir l'objet de ma mère. Ne pouvant pas quitter le campement avant ce jour, ce fut Gloria qui vint m'apporter une boite rectangulaire en bois parsemée d'ornements dorés. Elle m'expliqua que c'était mon père qui l'avait gardé depuis ma naissance et il m'avait aussi écrit une lettre. Celle-ci était plein de son typique amour paternel maladroit d'ours attachant comme je lui disait souvent, mais il y expliquait aussi qu'il me laissait libre de choisir de rester au campement si je le désirais. Je n'en voulais pas, mais je le reconnaissais bien là. J'ouvris alors la boite, y trouvant une baguette ornée d'une paire d'ailes dorées à son extrémité et enroulé autour de l'objet, un genre de parchemin. Juste avant que je ne touche un des deux objets, Gloria m'interrompt en saisissant mon poignet.
"Je t'encourage vivement à faire cela seule dans un endroit isolé, vous aurez besoin de toute l'inimité possible quand tu ouvriras le parchemin tout en tenant la baguette"
Je restai pantoise à sa remarque tout en hochant de la tête en la regardant dans les yeux et en faisant cela je remarquai une chose; elle avait presque le même regard coupable qu'il y a 5 ans. Je ne savais pas quoi lui dire pour faire disparaitre cette culpabilité alors je choisis de faire un simple geste, la prendre dans mes bras. Je la sentis d'abord raide et puis au fil des secondes se détendre de plus en plus avant de me rendre mon étreinte. D'un mouvement mutuel, nos fronts se touchèrent et je lui transmis par la pensée l'innocence qu'elle avait à mes yeux. Elle mis délicatement fin à ce câlin sans rien dire mais avec un sourire qui me semblait plus en paix. Nous nous disions au revoir et je réfléchis où faire ça, et je me mis à prendre de l'altitude jusqu'à être au dessus de la mer à une vingtaine de mètres de haut. J'ouvrir le coffret, pris d'une main les deux objets, plaçant la boite sous mon bras avant de dérouler le parchemin tout en tenant la baguette. Au fur et à mesure que je déroulais le parchemin, je sentais une légère brise m'entourer progressivement et alors que je commençai à le lire, une image se forma non pas physiquement devant moi, mais mentalement et accompagnée d'une voix suave et fluide.
Ma fille, mon brillant arc en ciel, tu es à un tournant important de ton existence, les choix que tu auras à faire seront importants et il n'y en a pas de bons ou de mauvais, juste des choix. Laisse toi guider par ton coeur, aussi lourd et aussi blessé peut il être. Saches que je vis et vivrai chacune de tes peines, de tes larmes et de tes rires comme les miens. Je sais que je t'ai imposé une vie et un rôle dont tu n'as pas voulu, mais je sais aussi que tu es bien plus forte que tu ne le crois. J'espère que tu arriveras un jour à croire en toi comme je crois et croirai toujours en toi. Cet objet, je l'espère, t'aidera à trouver un peu de lumière dans les moments les plus sombres. Quoi que tu fasses et quoi tu choisisses, je t'aimerai toujours plus fort que la plus dévastatrice des tempêtes. Tu es forte, tu es belle, et tu brilleras toujours dans mon coeur. Vogue sur le chemin qui te semblera le bon, celui sur lequel ton coeur te guidera. Et n'oublies jamais, ma fille, mon arc en ciel, que je t'aimerai toujours.Au dernier mot, le parchemin se dissipa dans l'air telle une volute de fumée ainsi que la voix s'éteignit comme la dernière note d'un instrument alors que dans ma main, la baguette s'était transformé en une boulle de verre d'une petite dizaine de centimètres de diamètre. Je la soulevai jusque devant mes yeux, elle semblait donner un effet optique comme remplie d'eau et en la faisant pivoter, les couleurs de l'arc en ciel y apparaissaient dans une danse élégante et hypnotisante. Je levai les yeux au ciel, débordants de larmes avec une seule pensée diriger vers les nuages
"Merci Maman"
Après cela, je décidai comme je l'avais pensé depuis 5 ans de retourner à New York retrouver mon père. Nos retrouvailles furent très émouvantes, et je lui montrai le cadeau de ma mère. Lui me rendit la plume que je garde toujours précieusement. Ces années, le parchemin et les sombres évènements récents m'avaient amené à choisir des études qui parlaient à mon coeur: Sage femme. Ce choix répondait à une intense pulsion de vie suite à toutes ces morts tragiques. L'occasion rêvée pour fêter tout ça apparut d'elle-même, la fête annuelle de Jupiter, sauf que l'évènement fut interrompu par le BEM devenant un affrontement sanglant. Cette fois il était hors de question de me laisser faire, bien que n'étant pas la plus combattante, je me rendis le plus utile possible. Transportant les blessés, relayant des informations et messages entre infirmerie improvisée et champ de bataille, me donnant sans aucune limite. Je finis par outrepasser mes propres limites et m'effondrer à court d'énergie. A mon réveil, comme un sens de déjà vu, la même jeune femme qui sept mois plus tôt m'avait vu pleurer l'amour de ma vie. Mais cette fois, bien que regrettant toutes les morts, je n'avais pas à rougir de honte de la place que j'avais prise. Et chacune de ces tragiques disparitions renforça mon désir, mon rêve de devenir sage femme.
Mon quotidien durant les années qui suivirent se répartissaient entre mon père, mes études, et le sport. Quand je le pouvais, j'essayais également de continuer mon apprentissage linguistique, avide de toujours connaître plus de langues et ne pas perdre celles que je maîtrisais. Lors d'un de mes nombreux stages pour mes études, je croisai un visage que je reconnus tout de suite: celle qui m'avait soigné lors des deux attaques. Ce fut l'occasion, pour moi, de ne plus la perdre de vue, son attitude plus protectrice un peu comme une grande sœur et sa dévotion dans son travail m'inspiraient énormément. De stage en stage et d'épreuve en épreuve, je finis avec pas mal de succès ces études et mes premières années dans cette profession me valut rapidement une certaine reconnaissance de mes qualités professionnelles mais surtout de mes qualités humaines. Il est vrai qu'un de mes atouts spéciaux était cette aptitude à calmer la plupart des gens simplement de par le son de ma voix et cela me permettait d'être particulièrement utile auprès des couples à l'hôpital. A côté de cette profession dans laquelle je m'épanouis, ma vie amoureuse est chaotique et sans réel engagement toujours blessée de la disparition de 2015. Et bien que je ne sois pas rancunière, une part plus sombre de moi espère toujours pouvoir un jour faire payer au BEM leurs sordides exactions. Je ne pouvais pas oublier et n'oublierai jamais.